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« Ça suffit pour aujourd’hui. Beau boulot les filles. » Journée de merde, entrainement de merde, cheerleading de merde, mais surtout, oui surtout, Kaitlin de merde. Je la déteste, bon dieu que je la déteste. Ce qu’elle peut être agaçante quand elle veut, c’est terrible. Avec sa putain de manie de toujours vouloir être dans les premiers rangs, d’être regardée par tout le monde, particulièrement tous ses putains de joueurs de football qui se croient meilleurs que tout le monde avec leur gros bras et leur corps d’athlète alors que dans la tête, y’a rien d’autre sauf de l’eau. Je les hais de la regarder comme ils le font et je la hais encore plus de ne pas les quitter des yeux, je la hais de la voir faire son petit spectacle encore et encore, comme une catin qui ne demande qu’à ce qu’on l’a prenne, comme une fille facile qui doit déjà s’être tapée plus que la moitié de l’équipe. Sauf que c’est pas vrai. Elle est rien de tout ça, mais bon dieu que j’aimerais qu’elle le soit. Il me semble que ce serait plus facile, tellement plus facile si j’arrivais à la détester autant que je le clame à qui veut bien l’entendre. Il me semble que la vie serait plus belle, si j’arrivais à me convaincre que Kaitilin Johnson est une moins que rien. Qu’elle était cette garce que je voulais bien m’imaginer. Mais elle ne l’était pas, et même si elle l’était ou bien qu’elle le devenait, elle ne le serait jamais pour moi. Peu importe ce que je prétend, elle sera toujours ma Kaitlin. Cette belle brune dont je suis tombée amoureuse. Cette belle brune qui m’a brisé le coeur. Cette belle brune à qui je dois cette carapace aujourd’hui. Et je ne sais plus si je dois la remercier ou non de tous ces moments vécues ensemble.

Ne pas la regarder, ne pas la regarder. Faire comme si elle n’était pas là, comme si elle n’existait pas, faire comme si sa présence ne me rendait pas complètement folle. Folle d’une façon que je n’arrive même plus à définir correctement tellement ça m’enrage, ça me fait mal, ça me brise le coeur, tout ça en même temps. J’avance lentement vers les vestiaires alors que je sais que Kaitlin n’est pas loin derrière, probablement en compagnie de l’une de ses amies à parler d’un sujet qui ne m’intéresse même pas. Je tiens pas à savoir. En réalité, je ne veux pas savoir du tout. Je ne veux plus rien savoir du tout en ce qui concerne la jeune femme. Ça fais presque trois mois qu’on est séparée, pourtant j’ai l’impression que hier encore nous étions ensemble, étendues sur mon lit à se coller et s’embrasser. J’arrive pas à croire que de telles images me reviennent encore alors que je tente de me convaincre qu’elle m’énerve, que je la déteste. J’aimerais qu’Alexis soit là. Là, maintenant, tout de suite, parce qu’elle, elle sait toujours comment me changer les idées quand mon esprit se remplit de Kaitlin. Mais elle n’est pas là et je dois faire celle qui s’en fou. Celle qui ne ressent rien, celle qui est au dessus de cette rupture, celle qui le vit bien, celle qui est indifférente face à tout le chaos que l’on causé, que l’on s’est mutuellement fait subir. J’ouvre la porte du vestiaire, déjà bondé de nombreuses filles de l’équipe, et crée mon chemin jusqu’à la douche, dans laquelle je reste probablement plus longtemps que nécessaire. Alors que l’eau coulait sur mon corps, j’arrivais à tout oublier. À ne penser à rien d’autre que la sensation que la chaleur de chaque goutte procurait à mon corps fatigué, épuisé de ce mal moral que je m’infligeais en tout temps. Pendant de nombreuses minutes, je me sens finalement en paix avec la vie, j’ai l’impression d’être moins tannée de tout, que pour un moment je n’ai plus à prétendre d’être quelqu’un que je déteste être. Mais ce genre de moments, ce genre de sensations, ça ne dure jamais bien longtemps, bien malheureusement..

Je ferme le robinet de la douche alors que je m’enroule dans ma serviette et sort finalement de la douche, retrouvant le monde cruel qui m’attendait à l’extérieur. Alors que je regagne la pièce centrale des vestiaires, je remarque une tête plus familière que toutes les autres. Alors que j’avais eu l’espoir d’avoir pris assez mon temps sous la douche pour éviter tout le monde, il fallait évidemment que la dernière qui reste avant moi ne soit nulle autre que cette Kaitlin. Je soupire bruyamment, resserrant ma serviette encore plus fort autour de moi alors que je sens quelques gouttes tomber de mes longs cheveux blonds qui descendent en vague le long de mon dos. Je me rapproche de ma case, qui n’est malheureusement pas très loin de celle de la brune. Je ne lui adresse même pas un sourire, pas un regard, je me concentre sur ma case que j’ouvre bruyamment, ma voix forte accompagnant le mouvement de ma case. « Encore là toi. Moi qui me croyait enfin libérée de ta présence. » Je ne savais plus comment agir autrement que par méchanceté avec elle. Comme si la fin de notre relation avait causé une espèce de tension tellement grande entre nous que nous n’étions plus en mesure d’agir autrement que par méfiance et coups bas l’une avec l’autre. Je savais que c’était ridicule, mais je n’étais pas prête à changer cette attitude. Pas prête à devenir une autre, ou encore celle que j’étais avant, avec elle. « Et puis cesse de me dévisager comme ça. T’as l’air plus stupide que d’habitude. » En effet, j’avais bien remarqué le regard qu’elle me lançait depuis tout à l’heure, je n’étais pas aveugle au point de ne pas remarquer et je remerciais la vie présentement que ce soit moi qui soit à moitié nue à l’heure actuelle, et pas elle. Car je savais parfaitement que je l’aurais regardé de cette même façon qu’elle me regardait présentement. Mais j’étais en pleine possession de la situation, pas elle. Heureusement..

« Ça suffit pour aujourd’hui. Beau boulot les filles. » Phrase en apparence insignifiante mais qui est source de soulagement pour moi. A peine l’entrainement des chearleaders commencé qu’il me tardait d’en finir. Sentiment qui m’animait depuis trois mois maintenant. Depuis ma rupture avec Weenie. Non pas Weenie l’ourson, mais Weenie Newport. Mon ex petite amie, accessoirement la seule femme que j’ai jamais aimée. Et qui m’a brisé le cœur – en tellement de morceaux qu’il me semblerait impossible de les recoller. Comme si risquer tous les jours de la croiser sur le campus n’était pas assez suffisant il fallait aussi que j’ai à la supporter trois fois par semaine, lors de nos entraînements. Oui car mademoiselle au même titre que moi faisait partie de l’équipe. La raison de notre rencontre d’ailleurs. Sauf que maintenant j’aimerais tellement qu’elle quitte les chears. Oh bien sur rien ne m’empêchait moi de partir – mis à part ma fierté. Cela serait faire preuve de faiblesse, et surtout prouverait à Weenie qu’elle arrive toujours à m’atteindre. Et puis je ne veux pas abandonner l’équipe, les filles comptent sur moi, même si je sais dans le fond que je ne suis pas indispensable ou irremplaçable – personne ne l’est. D’autant que ce n’est pas le nombre de candidatures qui manquent par ici. Seulement il était hors de question pour moi de prendre la fuite, même si cela signifiait souffrir en silence. Ne serait ce que poser les yeux sur la blondinette était une souffrance en soit. Voilà pourquoi je passais mon temps à m’escrimer pour être au premier rang. Pas pour aguicher les footballeurs comme j’aimais à le faire croire, mais bien pour avoir Weenie le moins longtemps dans mon champ de vision.

Sur le chemin des vestiaires, Weenie se trouve seulement à quelques pas devant moi. Alors je fais semblant de m’intéresser à la conversation d’une de mes coéquipières quand dans le fond j’en ai rien à carrer de ses histoires. Pourtant me voilà à sourire, lui assurer que Dylan – peut importe qui il est – s’intéresse surement à elle, qu’il faut seulement qu’elle patiente. L’hypocrisie n’est habituellement pas un de mes traits de caractère, seulement il fallait bien donner le change en présence de mon ex. Lorsque je la vis disparaitre au coin du couloir je décidai d’interpeller un des joueurs de hockey. Non parce qu’il m’intéresse mais plutôt pour gagner du temps, ne souhaitant guère me retrouver à moitié nue dans la même pièce que Weenie. Alors oui je le drague ouvertement et accepte même son invitation de le revoir dans la soirée. Après tout pourquoi pas ? Il était bien bâti, une bonne distraction. Ce n’est seulement qu’une dizaine de minutes plus tard que je daigne enfin entrer dans le vestiaire, dans l’idée que Weenie devait déjà avoir finie. Gravissime erreur. Quelle ne fus pas ma surprise alors que je venais d’enlever mes chaussure de la voir sortir de la douche – avec seulement une serviette pour la couvrir. Sans le vouloir, mon regard est immédiatement attiré par elle, je n’arrive guère à m’en détacher, tandis qu’elle passe devant moi sans même m’accorder un coup d’œil. Bon sang…Pourquoi faut il qu’elle soit toujours aussi sexy ? Avec cette petite serviette enroulée autours de son corps qui laissait entrevoir ses magnifiques jambes galbées et élancées. Ses cheveux mouillés dégoulinant dans son dos. Sa peau si douce… Il suffirait d’un rien pour que sa serviette glisse malencontreusement sur le sol. Croyez-moi je m’en veux d’avoir de telles pensées. Alors que je la déteste de tout mon être – enfin c’est ce que j’aime à croire – mon p’tain de corps lui réagit autrement. Il la désire. Or c’est bien la dernière chose au monde dont j’ai besoin en ce moment, que mon propre corps me trahisse. Non mais aussi quelle idée de mettre des douches communes dans les vestiaires ! Comment voulez vous que j’arrive à l’oublier si je suis obligée de la croiser trois fois par semaine en petite tenue ? Au moins les couples hétéros eux n’ont pas à subir cette torture. Oui car ça s’apparentait ni plus ni moins à de la torture pour moi, vraiment je vous assure.

Évidemment elle ne tarde pas à m’adresser la parole, pour se montrer désagréable au possible, comme d’habitude. Il semblerait que depuis notre rupture nous ne pouvions plus communiquer sans nous déverser mutuellement notre venin. « Cesse de me dévisager comme ça. T’as l’air plus stupide que d’habitude. » Je n’avais même pas réussi à cacher mon trouble, puisqu’elle me le fit si bien remarquer. Bon sang ce que je détestais cette situation, j’avais le sentiment d’être faible. Ne pouvait-elle pas enfiler quelque chose à la fin ? « Oh excuse moi, maintenant il faut que votre altesse accorde sa permission pour qu’on puisse la regarder ?! » Rageusement j’ouvre la porte de mon casier – détournant enfin mon regard d’elle, ça vaux mieux. « Et puis ne te donne pas plus d’importance que tu n’en as. » Comme si genre elle avait tort, je ne la dévisageais pas du tout, mouais. Alors que je désirais prendre mes vêtements propres, pas de bol pour moi au fond de mon casier, je remarque la présence d’un objet brillant : un bracelet. Pas n’importe lequel, celui que Weenie m’avait offert quelques mois plus tôt. Ne sachant même pas ce qu’il foutait encore là je referme tout aussi violement mon casier sans même prendre mes affaires ne supportant pas de l’avoir sous ma vue.

« Oh excuse moi, maintenant il faut que votre altesse accorde sa permission pour qu’on puisse la regarder? » J’ai envie de lui rire au visage devant une réplique aussi faible. Je ne sais pas ce qu’elle croit pouvoir me faire en me traitant d’altesse ou quoique ce soit. Elle veut que je me sente hautaine, arrogante, égocentrique, narcissique? Elle peut bien essayer tout ce qu‘elle veut, ça me passe dix pieds par dessus la tête, ce qu‘elle pense aujourd‘hui de moi. Du moins, c‘est ce que j‘essaye de me convaincre que je pense vraiment, que je m‘en fous, alors que c‘est sur que son opinion aura toujours une certaine importance, mais pas question qu‘elle le sache. Je me rapproche de Kaitlin, me place derrière et prend m‘assit sur le banc tout près, m‘assurant tout le temps que la serviette cache encore ce qu‘il y a à cacher. Bien que ce n‘était pas comme si Kaitlin n‘avait jamais tout vu.. « C’est ce que tu voulais, non? » Ma voix est arrogante, mais c’est exactement ce que je voulais. Je nous revoyais encore, quelques mois plus tôt, se disputant sans arrêt pour des raisons encore plus stupides les unes que les autres. Elle était de nature jalouse, très jalouse, et je l’étais aussi. Vous pouvez facilement imaginer les dégâts que ça a causé autour de nous, dans notre relation, dans ce que l’on partageais. On se gueulait dessus plutôt que de se parler et évidemment, on a fini par se détruire. Et j’ignorais aujourd’hui si je devais remercier ou haïr les filles qui s’approchaient trop de moi ou les garçons qui touchaient ma belle de cette façon qui me rendait verte de jalousie. Était-ce un bien, était-ce un mal? Sincèrement, aujourd’hui encore, je n’en étais pas certaine, malgré ce que je disais à qui voulait bien l’entendre. « Du moins, ce que tu voulais il y a quelques mois, quand ça t’importunait tant que d’autres me regardent. Et aujourd’hui, j’aurais pu le droit de choisir qui me regarde? » Aux nombres de serments qu‘elle m‘avait fait sur telle et telle fille que je n‘avais plus le droit d‘approcher parce qu‘elles étaient trop « intimes » pour les rapports que Kaitlin espérait que je partage avec les autres, je trouvais incroyable qu‘aujourd‘hui, elle s‘imaginait que je n‘aurais plus mon mot à dire sur qui me regarde ou non. Ce n‘était pas parce qu‘on était plus ensemble que j‘allais laissé tomber ces stupides règles qui s‘étaient imposés, nous éloignant un peu plus. J‘allais les user comme bon me semble, nous séparant peut-être définitivement. Si c‘était ce que je voulais.. «  Rêve pas trop Johnson, je peux toujours choisir, et t’es plus sur la liste. »

« Et puis ne te donne pas plus d’importance que tu n’en as. » C‘est vraiment tout ce qu‘elle a? Je lui offre ma face pas gentille, celle qui l‘a faisait tellement chier lorsqu‘on était ensemble, celle qui se montre indifférente et sarcastique à tout ce qui se passe autour, et les seules répliques auxquelles j’ai droit, ce sont ça? Des petites paroles super faciles à rembarrer? Et alors que les pensées s‘affluent dans mon esprit, j‘ai vraiment l‘impression d‘être la méchante dans cette histoire alors qu‘au fond, nous sommes deux à nous être retrouver le coeur brisé dans cette histoire. Pourtant, c‘était toujours le même refrain qui revenait, Kaitlin était la petite victime alors que j‘étais la grande coupable. Quoi de mieux pour faire pitié me direz-vous? « Je me donne l’importance que j’ai. » Tant qu’à avoir un rôle, autant le jouer au complet, c’est ce que je me dis. Autant mettre carrément le chapeau de coupable puisqu’il me va si bien. Et alors que je me relève pour retourner devant mon casier, j’aperçois ce petit bout de chaîne au même moment que la brune. Et alors que son premier réflexe est de fermer la case d’un mouvement brut et bruyant, j’en devine trop facilement ce qu’elle essaie de cacher. J’avais eu un doute en regardant vaguement le pendentif, mais avec sa réaction, il est évident qu’il s’agit du collier que je lui ai offert à nos six mois. Mon coeur se pince alors qu’avec ce visage arrogant qui me colle si bien à la peau, je me retourne vers Kaitlin et lui offre un horrible sourire avec de ré-ouvrir sa case et d’en sortir la chaîne, la faisant pendre devant ses yeux. « C’est la preuve même de ce que je dis. T’arrive même pas à te débarrasser d’une pauvre chaine. J’suis encore trop importante pour toi. » Ce n’était pas une pauvre chaîne et bien que je ne le démontrais pas ni dans mon visage, ni dans mes mots, ni dans ma façon d’agir présentement, mais cette chaîne elle avait énormément de valeur pour moi. À la base, c’était une chaîne que mon père avait offerte à ma mère pour leur 6 mois de relation. 6 mois plus tard, il l’a demandait en mariage. Et quand ma mère me l’avait offerte en me disant que je la donnerais un jour à celle que j’aime, je n’avais pas hésité un seul moment à l’offrir à Kaitlin pour nos six mois. Aujourd’hui, je me dis que c’était une stupide erreur de ma part, mais je fais comme si ça ne me dérangeait pas, bien que Kaitlin connaisse aussi bien que moi l’importance de cette cochonnerie. « C’est ridicule. Pourquoi est-ce que tu gardes encore cette foutue chaîne avec toi? » Une partie de moi aurait voulu qu’elle s’en débarrasse, qu’elle n’est pas à me mettre continuellement cette erreur de ma part, mais d’un autre côté, je voulais qu’elle la garde, je voulais qu’elle se souvienne. Je crois qu’au fond, je ne savais pas, je ne savais pas du tout ce que je voulais..

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